K r i s h n a m u r t i

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Extraits de causeries et d'échanges avec Krishnamurti

Extraits de causeries et d'échanges avec Krishnamurti




Un petit panorama des thèmes abordés par Krishnamurti lors de ses causeries ou des échanges avec ses interlocuteurs. Ce choix qui est tout à fait arbitraire pour ne pas dire personnel ne repose sur aucun critère. Il ne s'agit bien sûr que des extraits d'ouvrages dont les références sont indiquées en fin de chaque extrait.



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Sur le nationalisme [1].


QUESTION Qu'est-ce qui apparaît lorsque le nationalisme disparaît ?

KRISHNAMURTI — Évidemment, l'intelligence. Mais je crains que ce ne soit pas ce qu'implique cette question. Son sens est : par quoi peut-on remplacer le nationalisme ? Or, toute substitution nous prive d'intelligence.Si j'abandonneune religion pour une autre ou que je démissionne d'un parti politique pour adhérer à autre chose, cette constante substitution indique un état dans lequel il n'y a pas de compréhension.

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Comment le nationalisme disparaît-il ? Il ne peut disparaître que lorsque nous comprenons tout ce qu'il implique, lorsque nous sommes conscients de son action extérieure et intérieure. Extérieurement, il provoque des divisions entre les hommes, des classifications, des guerres et des destructions, ce qui est évident pour peu qu'on observe ce qui se passe. Intérieurement, psychologiquement, cette identification avec plus grand que soi, un pays, une idée, est manifestement une forme d'expansion de soi. Isolément je ne suis personne ; mais si je m'identifie avec quelque chose de grand, avec tout un pays, je me dis que je suis un Indien, cela flatte ma vanité, cela me donne une certaine satisfaction, un certain prestige, un sens de bien-être. Cette identification avec ce qu'on peut s'annexer de plus grand est une nécessité pour ceux qui pensent que l'expansion personnelle est essentielle, et crée, en fin de compte, des conflits entre individus. Le nationalisme non seulement provoque des conflits extérieurs mais aussi des frustrations intérieures. Chez la personne qui le comprend dans son entier, ce processus n'existe plus. Cette compréhension est fonction de l'intelligence que l'on met à observer soigneusement, à bien examiner tout le processus du nationalisme, du patriotisme. Cet examen même développe l'intelligence, et alors on ne remplace pas le nationalisme par autre chose. Dès qu'on le remplace par la religion, par exemple, celle-ci devient un autre moyen d'expansion personnelle, une autre source d'anxiété psychologique, due au fait que l'on se nourrit de croyances. Ainsi, toute forme de substitution, quelque noble qu'elle soit, est une forme d'ignorance, semblable à celle de l'homme qui remplace la cigarette par du chewing-gum ou autre chose. Par contre, chez celui qui comprend tout le problème de la cigarette, des habitudes, des sensations, des exigences psychologiques, et le reste, le désir de fumer disparaît. Cette compréhension totale est possible, car nous pouvons développer notre intelligence rien qu'en lui permettant de fonctionner ; et elle ne fonctionne pas tant qu'il y a substitution. La substitution est une façon de se soudoyer soi-même : on s'offre la tentation de faire une chose plutôt qu'une autre. Le poison du nationalisme et sa suite de misères et de conflits ne disparaîtra que par l'effet de l'intelligence, et celle-ci ne s'acquiert pas en passant des examens et en lisant des livres. L'intelligence nous vient lorsque nous comprenons les problèmes au fur et à mesure qu'ils surgissent. Lorsque nous les comprenons à tous leurs niveaux, c'est-à-dire non seulement sous leur aspect extérieur, mais aussi intérieurement, dans leurs implications psychologiques, en ce processus, l'intelligence naît. Lorsqu'il y a de l'intelligence, il n'y a pas de substitution ; lorsqu'il y a de l'intelligence, le nationalisme, le patriotisme, qui est une forme de stupidité, disparaît.

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Notes :

[1]. Extrait de La première et la dernière liberté, Stock, 1992, pp. 199-201




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